Plus proche du Management Consulting que de l’IT. Ou comment Agilytic progresse dans la science des données. Explications de Christophe Robyns, Managing Partner.
Récemment, Agilytic a franchi le seuil des 200 projets réalisés, alors que l’entreprise, née en 2015, n’occupe pas plus de 25 collaborateurs… En data science, c’est rare. Comment vous différenciez-vous ?
« Agilytic ne fait pas de science des données pour la technologie, mais pour le résultat. Toutes nos interventions visent à fournir des informations exploitables au départ du métier du client. Nous avons toujours un résultat mesurable à l’esprit lors du démarrage de nos missions. De même, nos équipes parlent le langage de l’utilisateur final qui peut-être un CEO comme le responsable de la supply chain ou du call-center. L’approche plait. »
Pas de data science pour la technologie, dites-vous… Un projet peut-il exister sans technologie ?
« Dans notre domaine, non. C’est évident. Car qui dit données dit forcément technologies pour aller les chercher, les traiter et les transformer en informations et les exploiter au quotidien dans les systèmes. En revanche, nous n’estimons pas nécessaires de mettre en avant le volet tech, nos clients ne considérant, finalement, que les résultats. Ils nous paient pour des résultats tangibles, qu’ils veulent rapides. Ce qui veut dire, encore, que nous sommes plus proches du conseil que de l’IT au sens strict du terme ! »
« Il est important de comprendre que le but final de la science des données est de résoudre un problème dans un domaine précis, alors que dans la tech on a parfois tendance à concentrer les efforts pour seulement identifier le problème. Aussi, il est indispensable d’avoir une très bonne connaissance du domaine d’application avant de se lancer dans l’élaboration d’un modèle. La collaboration avec nos clients est ici essentielle. »
Christophe Robyns et Julien Theys, les deux fondateurs d’Agilytic, précédemment actifs dans les secteurs de la technologie et des télécommunications, ont jeté un pont entre les données et la salle de réunion. Les sociétés se tournent souvent vers la data comme première solution à leurs problèmes. Ces données doivent toutefois avant tout servir les objectifs commerciaux.
Agilytic a néanmoins un département de R&D…
« Oui, essentiellement sur la partie Développement, pour assurer le plus possible notre autonomie et notre flexibilité dans les projets. Nous créons les accélérateurs qui nous permettent de mieux travailler dans nos phases de développement de solutions. Comme certaines API. Aujourd’hui, les librairies d’API sont cruciales pour nos projets. A travers elles, l’interconnexion entre les différents systèmes d’information est facilitée ; l’échange mutuel d’informations devient naturel, simple et bon marché. Ces API pré-existantes nous permettent de ne pas réinventer la roue et de nous appuyer sur des technologies éprouvées. AWS, par exemple, offre de nombreuses solutions. En ce sens, la technologie ne vient qu’en support. »
Exploitez-vous des technologies spécifiques ?
« Pour certains projets, nous avons recours à des algorithmes de type LLM (Large Language Models), algorithme de traitement naturel du langage pour résoudre par exemple des problèmes de classification et de résumé de documents ou la recherche d’informations dans des données non-structurées. La valeur de ce modèle est de pouvoir rapidement obtenir des résultats pertinents pour des tâches autrement complexes de traitement de données non structurées -typiquement des textes.»
Ne pas tout attendre de l’intelligence artificielle
« Autre usage de plus en plus important, OpenStreetMap. Cette solution reprend les principes de Wikipédia, la célèbre encyclopédie libre, pour la collecte de données cartographiques en mode open source. Chaque personne naviguant sur la plateforme peut contribuer à la connaissance collective, en l’occurrence en termes de localisation et de cartographie. Ainsi, chaque contributeur est libre de renseigner des informations sur des lieux, telles que des horaires d’ouvertures, une modification de numéro de rue ou un chemin de randonnée. Les applications, vous vous en doutez, peuvent être nombreuses. Ici, il ne s’agit pas d’AI. Mais ce type d’outil, bien exploité, peut néanmoins apporter pas mal de valeur à nos clients.»
Quid de l’usage des IA génératives ?
« Pas de data, pas d’IA ! N’attendons pas tout de l’intelligence artificielle ! Pour éviter de se retrouver dans le mur, un état des lieux des données disponibles et exploitables doit par conséquent précéder tout chantier. De même, les IA génératives ne représentent pas une solution à tous les problèmes. Dans la finance par exemple, estimer la capacité à rembourser un crédit implique de connaître les changements de situation de l’emprunteur : la naissance d’enfants, une séparation, un licenciement… et d’utiliser des algorithmes de Machine Learning qui fonctionnent différemment des IA génératives. Enfin, ne perdons pas de vue que des datas incorrectes mèneront à des actions incorrectes ! Ne négligeons pas la nécessité de disposer de datas de qualité pour développer ou affiner des modèles d’IA. »
Vos clients en sont-ils conscients ? Et, d’abord, n’attendons-nous pas trop de l’IA ?
« Jusqu’il y a peu, Agilytic devait encore évangéliser l’IA auprès des sociétés qui ne comprenaient pas vraiment comment celle-ci pouvait offrir une plus-value à leur business. La venue de ChatGPT a changé la donne. Pour un bien et pour un mal. Maintenant, il nous faut parfois gérer les attentes surdimensionnées -le fameux Peak of Inflated Expectations de Gartner. N’oublions pas que la technologie doit toujours être subordonnée aux objectifs business. C’est le résultat qui compte. Enfin, n’oublions pas que la valeur ajoutée de l’espèce humaine est l’imagination. »